27/04/2015
*Dolceviter*
Et puis l'espace se fait et avant qu'il m'aspire me vient l'envie de danser.
Je tape, tu vas à la Dolce Vita ?
Il répond, oui, avec S., la petite jeune que tu connais.
(Je suis vieille.)
J'ai envie d'un tango à la Dolce Vita parce qu'avec un nom pareil même s'il est raté, mon tango, je vais trouver de quoi me fabriquer des images.
Il pleut.
Le vert regorge les feuilles s'en balancent les seaux se remplissent la machine essore.
Je vais aller choisir ma robe.
*
Le remède à la mélancolie ce sont les chaussures dorées et la jupe qui se soulève qui se gonfle qui ondule quand en tournant nous passons devant les ventilateurs posés au raz du sol.
Voilà. C'était ça la Dolce Vita hier soir.
Un doux vent dans les jambes.
22/04/2015
*Saluer*
"Ce mois de mars s’annonce triste encore. Rien
ne se passe rien ne la grise elle boit la tasse c’est dégueulasse. Merci
Benjamin.
C’est aussi le mois du premier cheveu blanc.
Incroyable. Elle n’y croit pas. Ce n’est pas possible. Un cheveu blanc. Bien
sûr on le voit à peine, dans ses cheveux clairs. On le voit à peine, on ne le
voit pas même, mais elle le voit elle, qui se dresse en vainqueur. Seul.
Seul au milieu de tous les autres. C’est terrible. Elle sait que c’est un
signe, encore un, du temps qui passe. Elle ne veut pas. Elle ne peut pas.
Vieillir. Non. C’est insupportable. Ce n’est pas elle une vieille femme. Une
femme même. Elle veut toujours être cette jeune fille errante. Même si elle est
triste. Elle veut être celle qui séduit. Elle veut séduire toujours. Avoir la
peau lisse. Et pas de cheveux blancs.
Que c’est triste. Et émouvant en même temps. Sa solitude. A lui. A ce cheveu. Sa solitude. Sa clarté aussi. La clarté de ce cheveu blanc lui est soudain très émouvante."
Que c’est triste. Et émouvant en même temps. Sa solitude. A lui. A ce cheveu. Sa solitude. Sa clarté aussi. La clarté de ce cheveu blanc lui est soudain très émouvante."
(Extrait du très vieux manuscrit abandonné.)
*
C'était le jour de l'enterrement de mon grand-père. Je me tenais debout derrière ma grand-mère, assise sur ses roulettes, déjà. Nous étions devant l'église. Les amis venaient l'embrasser, lui serrer la main, avant d'entrer par la grande porte.
Un vieux monsieur s'est approché d'elle, s'est présenté et lui a dit :
"Je suis venu saluer mon vieil ami. Il y a sûrement cinquante ans qu'on ne s'était pas vus, je l'aimais beaucoup Paul, on était de vieux copains, on en a fait de belles tous les deux !"
Et là, dans ma tristesse, j'ai ressenti profondément l'absurdité de la situation.
J'ai eu envie de lui dire, à ce vieux monsieur doux et charmant : Mais pourquoi ? Pourquoi n'êtes-vous pas venu voir mon grand-père quand il était vivant ? Pourquoi n'êtes-vous pas venu goûter son vin, admirer son jardin ? Pourquoi n'êtes-vous pas venu vous asseoir sur son banc, pour caresser ensemble vos souvenirs ? Pourquoi n'êtes-vous pas venu avant vous régaler de la cuisine de sa femme, avec la vôtre ? Pourquoi ne seriez-vous pas allés tous les quatre au bal dans la même voiture, vos dames à l'arrière en robes fleuries, et vous, la clope au bec, riant, les vitres ouvertes ? Pourquoi n'êtes-vous pas venu le chercher pour partager une balade une partie de pêche ou de pétanque un bout de zing ou je ne sais quoi ?
A quoi cela sert-il de rendre visite aux gens quand ils sont devenus froids ? Quand ils ne peuvent plus vous sourire ? Quand vous ne pouvez plus leur faire plaisir ? Quand ils ne peuvent plus vous faire plaisir ? Dites-moi, dites-moi, hein, à quoi cela sert-il ?
*
*
Je ne comprends pas pourquoi on est tous là à ne rien oser se dire.
Je pense à vous. A toi. J'espère que tu viendras me saluer un jour, avant que je sois totalement blanchie, avant que je ne puisse plus danser, avant que je sois refroidie.
*
Qu'est-ce qu'on attend ?
*
Qu'est-ce qu'on attend ?
*
J'ai mis dans le magasin deux mini affiches. Des duos photo/dessin. J'espère qu'ils vous plairont.
16/04/2015
*Remédier*
- L'important, dit-il, c'est le mouvement.
- Le mouvement comme ça ? demande-t-elle en se levant et en faisant tourner sa jupe.
- Le mouvement comme vous voulez.
*
J'aime sentir le bas de ma robe danser.
J'aime sentir le tissu caresser mes jambes nues.
- Le vert vous va très bien.
- Merci.
Vous savez, c'était hier, c'était la nuit déjà, c'était là-bas encore, j'ai couru sur les pavés au risque de me tordre les chevilles, j'ai couru an talons, j'ai couru j'ai traversé la place, j'ai frôlé la fontaine, celle qui fait le bruit, la nuit, le vacarme d'un Fellini, j'ai couru jusqu'à l'estrade sous les verrières de la Villette, j'ai couru et j'ai dansé, six tangos bancals dans mes chaussures dorées, six tangos, deux danseurs et la douceur du ciel noir.
Je vous assure, si, oui, je vous assure, on est beaucoup plus vivant quand on danse. Et encore plus quand on écrit à la suite. Et quand on court aussi. Et quand on écrit que l'on court. Et quand on écrit que l'on veut. Quand on écrit je veux. On est beaucoup plus vivant. On est beaucoup plus vivant quand on écrit que le bas de la robe danse. Et surtout quand on le sent. Quand on écrit je veux. Je veux sentir encore le bas de ma robe danser. Je veux encore danser. Je veux encore que tu. Je veux encore que tu me fasses danser.
*
Ce n'était pas hier, c'est un texte ancien.
Mais je vais enfiler cette nouvelle jupe comme un remède et tourner devant le fenêtre ouverte.
On verra bien.
09/04/2015
*Percer*
C'est comme ces petites plantes petites fleurs petites herbes qui arrivent à se faire une place dans une fissure de bitume dans le coin d'une trappe d'égout dans le relief d'un mur dans un endroit hostile dans l'immensité là où on les ignore là où tout est bouché là où ça ne respire plus là où il faut être fort là où les routes sont tracées là où c'est interdit là où les autres ne regardent plus là où on les écrase là où les filles portent toutes les mêmes chaussures
Elles sont incongrues, ces fleurs
Elles sont étranges
Elles sont résistantes
Elles sont émouvantes
Elles sont vulnérables
Elles sont frêles
Elles sont seules
Oui
C'est un peu comme ça
*
- Mais pourquoi un canard ?
- Je vous dirai après.
07/04/2015
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